La culture locale, parent pauvre de la télévision
- Par Jean Francis
- 05 déc. 2022 10:37
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Depuis la mi-octobre 2022, les amoureux du petit écran se sont découvert un nouveau « divertissement » sur l’une des chaînes du groupe Canal+ : c’est la téléréalité The Bachelor, dans sa version Afrique francophone. L’intérêt pour Joël William, le personnage principal et ses « bachelorettes », ces multiples jeunes dames, dont le rêve pour chacune est d’être l’élue qui aura le privilège de recevoir l’ultime rose. On peut donc voir, sans doute pour le regretter, les mines désespérées de ces jeunes dames, à la fin de chaque épisode, lorsqu’arrive le moment de la remise des roses. Celle n’en ayant pas reçu est considérée comme éliminée de la course. Cette série, au-delà du succès qu’elle connaît, à relativiser bien évidemment, pose deux problèmes. Le premier, et non des moindres, est sans doute cette sorte de « chosification » de la femme. Celle-ci semble perdre toute dignité dans une société africaine qui, bien qu’étant ouverte à de nombreuses influences étrangères, n’en garde pas moins un minimum de valeurs et de respect à l’ égard de la gent féminine. Ici, les candidates doivent se battre devant les caméras pour espérer attirer l’attention du personnage principal et ainsi durer dans la compétition, à défaut de remporter la rose finale. Cette émission rame à contre-courant de la tendance actuelle qui est à la valorisation de la femme, particulièrement sur le continent africain où elle souffre encore d’un certain nombre de discriminations du fait de pesanteurs sociales et culturelles. Autre fait contrariant, c’est l’attitude des femmes elles-mêmes vis-à-vis de cette émission. Il est loisible de constater que la chaîne Canal+ Pop bat certainement des records d’audimat tous les samedis dès 20h 30 mn. Une audience où se recrute une écrasante majorité de femmes. Sont-elles conscientes du rôle qu’elles sont appelées à jouer dans cette aventure ? Il nous est permis d’en douter.
L’autre problème que pose la série « The Bachelor », c’est la place de plus en plus minimaliste des productions locales parmi celles qui sont diffusées à l’attention du public africain. Ce programme télévisé, ne l’oublions pas, est la pâle copie d’un autre du même nom, diffusé depuis mars 2002 sur l’une des chaînes du groupe audiovisuel américain, American Broadcasting Company, (ABC). Quelle est aujourd’hui l’offre des programmes de nos chaînes de télévision ? Quelle est la proportion des contenus africains sur les chaînes de télévision, notamment en ce qui concerne le divertissement ? Ou tout simplement en termes de programmes locaux ? Il faut le reconnaître, l’on est actuellement très loin des 80% des programmes locaux attendus sur les chaînes nationales. Cela peut paraître simpliste de le dire de cette façon. Essayons simplement de prendre la télécommande et zappons les différentes chaînes nationales. Le résultat saute aux yeux : la télévision au Cameroun, qu’elle soit publique ou privée, est considérablement tournée vers l’extérieur. Que ce soit en ce qui concerne la quantité ou la qualité. La plupart des émissions sont des copies de ce qui est fait ailleurs. Pour les titres, on peut juste changer un mot et passer des « Grandes bouches » aux « Grandes gueules ». Ainsi, nous poursuivons le travail commencé par les chaînes occidentales, de la lointaine Amérique latine ou tout simplement des pays voisins du Cameroun : à savoir le matraquage des consciences avec la diffusion des cultures des autres au détriment de la nôtre. Nous ouvrons ainsi la porte à la diffusion chez nous de scènes contraires à nos us et coutumes, comme on le constate malheureusement aujourd’hui, qu’il s’agisse des programmes destinés aux adultes et même, de plus en plus à ceux que regardent les plus petits à longueur de jou...
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