113e Conférence internationale du travail : la voix du Cameroun

Le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Grégoire Owona, a pris part au Sommet mondial sur la justice sociale, le 12 juin dernier à Genève en Suisse. L’événement était organisé dans le cadre de la 113e Conférence internationale du travail (CIT) qui s’est tenue du 2 au 13 juin dernier. Les échanges avaient pour but, notamment pour le Cameroun, de mieux affiner les axes d’implémentation du travail décent, au regard des défis et des domaines prioritaires du monde du travail en constante évolution. Le chef de la délégation camerounaise a saisi l’occasion de ces assises pour présenter au monde la vision de développement économique et sociale du gouvernement. Tout comme l’importance accordée au dialogue social inclusif, par l’entremise des plateformes d’échanges telles que la Commission nationale consultative du travail, les Commissions mixtes paritaires sectorielles, ainsi que le Comité de concertation et de suivi du dialogue social. De retour au pays après cette expérience enrichissante, CT revient sur cette participation avec le ministre du Travail et de la Sécurité sociale.

 

Vous revenez de la 113e session de la Conférence Internationale du Travail 2025 à Genève en Suisse, quel était l’enjeu de la participation du Cameroun à cette instance ?
Le Cameroun est membre de l’OIT depuis juin 1960, la coopération avec cette instance spécialisée des Nations unies est assez fructueuse, nous avons reçu plusieurs appuis et accompagnements dans la mise en œuvre de l’agenda du Travail décent dans notre pays, à travers divers programmes et initiatives menés avec l’OIT. Il est donc important pour nous, de consolider ces liens et de faire valoir la diplomatie de présence au sein de cette institution car les problématiques du monde du travail sont très dynamiques et évolutives. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être absent lors d’une telle rencontre qui est un véritable rendez-vous du donner et du recevoir. Nous avons particulièrement contribué à la discussion sur la transition de l’informalité à la formalisation ; nous nous enrichissons également des expériences des autres, c’est le cas avec l’économie des plateformes et la prise en compte des dangers biologiques en matière de sécurité et santé au travail. Nous avons également pris part au 2ème Forum sur la Coalition Mondiale pour la justice sociale, initiative du Directeur Général qui permet de mettre en relation les mandants tripartites, d’aborder les priorités mondiales telles que le salaire vital face aux défis systémiques, notamment la pauvreté et les inégalités de revenus. L’amélioration des opportunités des jeunes sur le marché du travail en vue d’une lutte contre le chômage plus pertinente et l’accompagnement des grandes multinationales aux PMEs et petits producteurs locaux à travers l’assainissement des chaînes d’approvisionnement, la responsabilité sociale des entreprises, ainsi que le dialogue sur l’Intelligence Artificielle comme moteur du changement au service de l’impact social ont été abordés. 


Emplois, droits et croissance : Renforcer les liens, sont les maîtres mots du rapport du DG de l’OIT, à l’ouverture des travaux. Où en sommes-nous avec ces notions au Cameroun ? 
Face au chômage grandissant, et aux nouveaux défis mondiaux, le président de la République du Cameroun S.E Paul Biya a dévoilé lors de son discours du 10 février 2025 adressé à la jeunesse, les nouvelles initiatives destinées à favoriser l’insertion professionnelle des jeunes, des personnes vulnérables et des femmes, pour répondre aux exigences d’un monde du travail en constante mutation. Ces initiatives tiennent compte de l’avènement de l’économie numérique, la montée en puissance de l’Intelligence artificielle (IA), la pluralité des risques biologiques, l’informalité toujours en hausse et de tous autres défis que rencontrent les acteurs du monde du travail. Conformément aux idéaux de justice sociale, chers à notre pays, toutes ces initiatives s’appuient sur le respect des Normes Internationales du Travail, qui constituent le socle de base qui permet de conférer davantage de droits aux travailleurs du monde entier et de leur garantir des emplois décents. Le lien entre les emplois décents, les droits et la croissance n’est plus à démontrer. Et il est évident, qu’une croissance économique efficace est le résultat immédiat des emplois de qualité. Ceux-ci sont négociés dans des cadres d’échanges tripartite et transparent ; visant l’amélioration et le bien-être des salariés, en vue du développement économique durable, gage d’une stabilité sociale et sociopolitique. 
Au cours de cette Conférence internationale du Travail, plusieurs Commissions ont été mises en place. Quelles sont les résolutions les plus importantes à retenir ?
Elles sont de plusieurs ordres et sont toutes importantes. Nous avons une dizaine de Commissions et pouvons évoquer quelques-unes : La Commission des affaires générales s’est penchée sur la contribution tripartite de l’OIT au sommet de Doha sur le développement social. Cette contribution vise à garantir que les questions liées au travail et à l’emploi soient au cœur des efforts de développement social en promouvant le dialogue social, l’équité et la justice sociale. Elle a également soumis aux mandants de l’OIT, les amendements à la Convention du travail maritime MLC 2006 portant sur le rapatriement sans discrimination, la permission à terre, les frais de rapatriement, ainsi que les procédures de plainte à bord. Les Commissions normatives quant à elles ont travaillé à l’élaboration des normes internationales du travail sur les dangers biologiques en deuxième discussion ; une norme et une recommandation ont été adoptées à l’issue des travaux.  L’économie des plateformes a connu une première discussion qui envisage l’adoption dans les prochaines éditions de la CIT d’une convention et d’une recommandation. Ces instruments viennent renforcer le cadre juridique en matière de santé et sécurité au travail, couvrant ainsi des domaines non encore couverts. Quant à la Commission chargée de la Discussion Générale focalisée sur la transition du secteur informel vers le secteur formel, elle a mis en lumière l’urgence de traiter la question de l’informalité, non seulement pour améliorer les conditions de travail des personnes concernées, mais aussi, pour assurer un développement économique et social durable, enjeu crucial pour le travail décent et le développement inclusif sans laisser personne à l’écart. 


En quoi a consisté de façon concrète la participation du Cameroun à cette instance tripartite ?
Il convient de souligner que les rencontres en matière de travail sont tripartites. Notre pays était représenté à cette rencontre par une délégation constituée des représentants du gouvernement, des employeurs et des travailleurs. Au cours des travaux, le Cameroun a été désigné rapporteur de la Commission chargée de la discussion générale sur l’informalité. Les autres mandataires du pays ont partagé l’expérience du Cameroun sur les questions abordées en suggérant des approches nouvelles. Bien plus, nous avons été actifs dans les groupes de rédaction et avons appuyé les pays amis sujets à des interpellations. Il est important de noter que les rapports entre les travailleurs et les employeurs ou le Gouvernement se sont davantage améliorés au Cameroun : depuis plusieurs années, le Cameroun n’a plus été interpellé à l’OIT pour divers manquements autre fois constatés.


Au-delà des aspects techniques, sus développés, vous avez évoqué la diplomatie de présence, la consolidation des liens avec l’institution et ses dirigeants. Qu’avez-vous mené comme action ?
J’ai été reçu en audience par la Directrice Régionale OIT pour l’Afrique, le jeudi 05 juin à 14 heures. Nous avons abordé au cours de cette rencontre, les différents défis de l’agenda du Travail décent sur notre continent, notamment l’informalité et les mesures opérationnelles proposées par le BIT dix ans après l’adoption de la recommandation n°204, les mécanismes de renforcement des capacités des partenaires sociaux employeurs et travailleurs, et sur la possibilité pour le Cameroun d’organiser la 15ème réunion régionale africaine de l’OIT. Lors de l’audience avec le Directeur général du BIT, ce dernier a salué la présence « rassurante » du Cameroun lors des grandes instances de l’OIT, la prise de responsabilité dans les groupes de travail et les commissions, mais également le partage d’expérience avec les autres pays africains dans le cadre de la prise des décisions concernant le Groupe africain. La question du redimensionnement des Bureaux sous régionaux de Yaoundé et de Kinshasa a aussi été abordée, faisant suite à la création du Bureau sous régional des pays lusophones en Angola.
En marge de la Conférence internationale du Travail, vous avez aussi représenté le Cameroun au Conseil d'administration du CRADAT et à la Conférence des ministres de la CIPRES. 
Le Centre régional africain d’administration du travail (CRADAT) a été cr&eac...

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