« Une industrie compétitive en construction »
- Par Aïcha NSANGOU N.
- 09 Oct 2025 16:03
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Dr. Fabrice Assoumou Zambo, spécialiste en économie du développement.
Docteur, Comment appréciez-vous le développement technologique et industriel du Cameroun ?
Le développement technologique et industriel du Cameroun offre un panorama contrasté, alliant un potentiel indéniable à une concrétisation encore inégale. Une dynamique réelle se dessine, portée par une stratégie nationale ambitieuse visant à moderniser le pays et à transformer son économie. Sous l’impulsion des pouvoirs publics, le Cameroun s’appuie sur la valorisation locale de ses ressources naturelles, en particulier minières, couplée à l’innovation technologique, pour construire une industrie compétitive. Des projets d’envergure – tels que l’exploitation de la bauxite à Minim-Martap, l’usine d’aluminium Proalu SA ou l’unité de production d’engrais Hydrochem (120 000 tonnes/an) – illustrent cette impulsion concrète vers une industrialisation accrue, s’inscrivant dans le cadre de la Stratégie nationale de développement 2020-2030. Cependant, les réalisations restent en deçà des objectifs affichés. Le secteur industriel ne contribue qu’à hauteur de 13,9 % au PIB national, un niveau encore jugé insuffisant pour entraîner la transformation structurelle de l’économie. La révolution numérique, quant à elle, ne s’amorce que timidement, malgré une augmentation de 40 % des transactions digitales en 2024, signe d’un potentiel technologique réel mais insuffisamment exploité. Cette trajectoire de développement se heurte à des défis structurels majeurs – insuffisance énergétique, lourdeur administrative et déficit en capital humain spécialisé – qui entravent une transformation profonde et inclusive.
Au regard des infrastructures déjà mises en place, pensez-vous que le Cameroun a aujourd’hui des industries à la hauteur de ses ambitions de développement ?
Concernant les infrastructures industrielles, le pays s'est effectivement doté d'installations clés comme le Complexe industrialo-portuaire de Kribi, qui positionne le Cameroun comme un hub logistique régional. Il en va aussi des infrastructures récentes telles que le barrage de Mékin ou celui de Nachtigal, qui constituent des atouts stratégiques indéniables pour désenclaver les territoires et réduire les coûts logistiques. En outre, le budget d'investissement pour 2025, dépassant 1,100 milliards de F, soutient la modernisation des infrastructures routières, énergétiques et technologiques, indispensables à l'essor industriel. Pour autant, force est de constater que l’industrie camerounaise, bien qu’émergente, n’a pas encore opéré la mue décisive. Elle reste majoritairement cantonnée à la consommation finale ou à la première transformation, alors que l’ambition d’émergence exigerait un saut qualitatif vers des industries lourdes, fortement intégrées et génératrices d’une valeur ajoutée significative. Le potentiel, certes, n’est plus à démontrer ; la maturité industrielle, elle, demeure en chantier.
A votre avis, les conditions sont-elles réunies pour le développement industriel et technologique du Cameroun ?
Si les fondations existent bel bien, le Cameroun n'a pas encore assemblé les conditions nécessaires à un décollage industriel et technologique pleinement abouti. Le pays peut s'appuyer sur des atouts considérables : un marché intérieur porteur, une position géostratégique centrale, une base agricole et minière diversifiée, un système bancaire relativement profond et un potentiel hydroélectrique abondant. À ces atouts structurels s'ajoutent un capital humain en progression et un dynamisme certain dans l'entrepreneuriat numérique, tandis que les zones industrielles émergent, que la connectivité s'améliore et que des réformes fiscales et douanières sont engagées. Cependant, cet élan se heurte à de sévères goulots d'étranglement qui entravent l'écosystème global. L'accès au financement demeure un obstacle majeur pour les PME, qui constituent l'écrasante majorité du tissu économique, et les déficits énergétiques et infrastructurels persistent. Une fiscalité peu incitative, des lourdeurs administratives, les difficultés d'accès au foncier et les insuffisances dans la formation d'une main-d'œuvre hautement qualifiée constituent autant de freins substantiels. Aussi, la synergie entre l'État, le secteur privé et le monde académique reste à c...
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