« L'effervescence du secteur minier a généré des impacts économiques substantiels »
- Par Jocelyne NDOUYOU
- 30 déc. 2024 13:30
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Pr. Youssouf Nvuh Njoya, agrégé des sciences économiques, enseignant à l’Université de Yaoundé II-Soa.
Professeur, alors que l’année 2024 tire à sa fin, quels faits économiques vous auront le plus marqués ?
L'année 2024 aura été marquée par plusieurs événements économiques majeurs qui ont profondément impacté le pays : la diminution du pouvoir d’achat des ménages à la suite du réajustement des prix du carburant à la pompe, et d’importantes évolutions en matière de finances publiques. Concernant l’érosion du pouvoir d’achat, le réajustement des prix du carburant à la pompe a constitué un tournant décisif, avec une augmentation de 15% portant sur le prix du Super à 840 F et celui du gasoil à 828 F. Pour atténuer l'impact social, le gouvernement a mis en place trois mesures : une revalorisation de 5% du salaire de base des agents publics, une augmentation du salaire minimum à 43 969 F et un allègement de certaines charges dans le secteur du transport routier. Malgré ces initiatives, cette augmentation a entraîné une hausse généralisée des prix et contribué à porter l'inflation à 7%. Quant aux finances publiques, deux changements sont intervenus. En premier lieu, l'ordonnance du 20 juin 2024 modifiant la loi de finances a augmenté le budget de l’État de 8%, le portant à 7.278,1 milliards de F. Pour financer cette croissance, le gouvernement a prévu un rehaussement de l'enveloppe de sa dette de 488 milliards de F et une mobilisation de 467 milliards auprès des partenaires techniques et financiers. Sur le plan fiscal, la mobilisation des recettes internes a été relevé à 4.203 milliards de F. En second lieu, la mise en œuvre effective de la déclaration de l'IRPP a constitué une réforme fiscale déterminante en 2024. Bien que cet impôt existe dans le système fiscal camerounais depuis 1973 et ait été réformé par la loi n° 2002/014, sa réactivation s'inscrit dans une stratégie d'élargissement de l'assiette fiscale face aux contraintes budgétaires croissantes. La Direction générale des Impôts vise à mobiliser 0,6% des recettes fiscales projetées à 3.998,7 milliards de F à fin décembre 2024 grâce à cet impôt.
Cette année, le secteur minier a été particulièrement en effervescence, grâce notamment à l’adoption d’un nouveau Code minier et à l’entrée en exploitation de plusieurs gisements de fer, tout comme la modernisation de l’activité aurifère. Comment en avez-vous ressenti l’impact sur l’économie nationale ?
L’année 2024 souligne une effervescence du secteur minier camerounais, avec des impacts économiques substantiels nécessitant une vigilance particulière pour éviter ce que les théoriciens appellent la « malédiction des ressources naturelles » souvent observée dans des contextes similaires. Trois grands projets majeurs d'exploitation du fer ont été lancés : le projet de Bipindi-Grand Zambi, avec ses 160 millions de tonnes exploitables sur 40 ans. Le projet Mbalam-Nabeba, qui vise à faire du Cameroun le 5e producteur mondial de fer, et la mine de fer de Lobé à Kribi, quant à elle, avec son potentiel de 632,820 millions de tonnes. Le secteur de la bauxite connaît également une avancée remarquable avec le projet de Minim-Martap doté d'un potentiel estimé à 892 millions de tonnes. Les impacts socio-économiques sont considérables. Une création massive d'emplois prévue. Le projet Mbalam-Nabeba, à lui seul, prévoit plus de 20 000 emplois directs. Le développement des infrastructures, notamment la construction de voies ferrées, de terminaux minéraliers au Port autonome de Kribi et d'installations industrielles comme le complexe sidérurgique prévu à Fifinda laisse envisager des retombées économiques significatives. Le gouvernement annonce une augmentation de 1% de la contribution du secteur minier au PIB en 2024. Cette croissance représente une opportunité stratégique pour diversifier l'économie camerounaise, traditionnellement dépendante du pétrole, et pour élargir son assiette fiscale.
Certains secteurs comme les routes, l’électricité, l’eau, etc., ont continué de donner des insomnies aux Camerounais. Y a-t-il, selon vous, des solutions durables et rapides à ces problèmes ?
Tout d’abord, il est important de souligner le rôle clé des infrastructures dans le développement économique d’un pays. Le récent classement du Forum économique mondial, qui place le Cameroun à la 108e place sur 119 pays en termes d’infrastructures et des services, reflète les préoccupations quotidiennes des Camerounais qui font face à des délestages fréquents, des difficultés d’accès à l’eau et un réseau routier dégradé. Cette situation est aggravée par la lenteur dans l'exécution des projets d'infrastructure, des surfacturations régulièrement dénoncées et un manque d'entretien des installations existantes, impactant significativement la qualité de vie des populations et le développement économique du pays. Pour remédier à ces défis, deux axes de solutions sont proposés. Le premier concerne le renforcement du processus de maturation des projets d'investissement public, cause majeure des retards et des dysfonctionnements actuels illustrés par l’exemple du barrage de Mekin. L'analyse des documents existants révèle des faiblesses significatives dans le processus actuel de maturation des projets, malgré les efforts de réforme entrepris depuis 2010. Pour résoudre rapidement ces difficultés, des solutions inspirées de modèles internationaux peuvent être suggérées...
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