« Le secteur privé souhaite l’amélioration de la qualité des infrastructures »
- Par Junior MATOCK
- 17 Dec 2025 12:29
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Daniel Claude Abate, président du Mouvement des entreprises du Cameroun.
Monsieur le président, l’un des chantiers prioritaires du nouveau septennat est de continuer à faire du secteur privé un outil important pour la croissance économique. Comment cela peut-il se faire concrètement ?
On ne le dira jamais assez et ça ne saurait être un simple slogan : « le secteur privé est bel et bien le moteur de la croissance », il est donc nécessaire que tout soit mis en œuvre pour améliorer l’environnement des affaires mais également pour continuer de renforcer la compétitivité de notre économie et partant de nos entreprises. Si au cours du septennat passé, l’économie camerounaise a continué de croître (en moyenne autour de 3 %), il reste que les niveaux de croissance atteints restent très insuffisants pour provoquer les transformations structurelles dont notre pays a besoin pour se développer au niveau de son potentiel et relever significativement le niveau de vie des populations. Concrètement, pour accélérer et booster notre croissance de manière soutenue et durable, il faut créer les conditions et l’environnement propice pour que le secteur privé joue pleinement son rôle et maximise sa contribution dans le PIB. Cela passe nécessairement par la reprise et l’accélération des réformes structurelles et réglementaires qui permettent de libérer les entreprises et les investisseurs privés de toutes les entraves et pesanteurs qui continuent d’étouffer la pratique et l’environnement des affaires dans notre pays au point de comprimer leur développement. Au-delà de ces réformes structurelles liées directement à l’amélioration de l’environnement des affaires, le secteur privé attend aussi beaucoup au cours de ce nouveau septennat : l’amélioration générale de la qualité des infrastructures (routières, énergétiques et de TIC notamment), la concrétisation de la réforme de la justice des affaires avec la mise en place effective des tribunaux du commerce, l’aboutissement de la réforme foncière car la multiplication des contentieux dans le domaine freine non seulement les investissements privés mais pénalise aussi le financement des entreprises.
Les plateformes telles que le Cameroon Business Forum, les Rencontres économiques du Cameroun, etc., sont des maillons essentiels dans le dialogue public-privé. Comment peut-on mieux capitaliser ces plateformes pour améliorer davantage le climat des affaires ?
Je voudrais tout d’abord regretter qu’au cours du septennat passé le dialogue public-privé ait quelque peu régressé. Le Cameroon Business Forum (CBF) a en effet cessé de se tenir ou de fonctionner depuis quatre ans et n’a pas été remplacé par une plateforme stratégique de même niveau. Le CBF a d’ailleurs fait son temps et ne nous parait plus être aujourd’hui une instance ou plateforme appropriée et efficace pour le dialogue public-privé. Si le dialogue public-privé n’est pour autant pas rompu, loin s’en faut, il est cependant urgent, à l’entame de ce nouveau septennat, et au regard des grands défis économiques du monde actuel, que le gouvernement et le secteur privé s’accordent sur un nouveau modèle de dialogue public-privé qui tienne compte et corrige les manquements ou dysfonctionnements observés durant le temps du Cameroon Business Forum. C’est une urgence.
S’agissant de la fiscalité, les milieux d’affaires affirment régulièrement qu’elle est un handicap à l’épanouissement du secteur privé. Qu’est-ce qui peut être fait pour changer la donne ?
Le secteur privé plaide en effet depuis de nombreuses années pour une refonte de notre modèle fiscal. Pour faire simple pour vos lecteurs, le secteur privé déplore que nous ayons un modèle fiscal qui repose encore beaucoup plus sur la taxation du chiffre d’affaires que sur le bénéfice. C’est une des fortes demandes du secteur privé. En outre, le secteur privé formel a l’impression que ce sont toujours les mêmes qui paient alors même que le nombre d’entreprises créées ces dernières années a plus que triplé, même si un très grand nombre de ces entités sont des Petites et moyennes entreprises (PME) et Très petites entreprises (TPE) dont la contribution en termes de recettes fiscales reste relativement modeste. Dans tous les cas, le secteur privé continue d’encourager le gouvernement à poursuivre les efforts d’élargissement de l’assiette fiscale pour desserrer progressivement l’étau fiscal qui serre de nombreuses entreprises contribuables.
Au-delà de ces demandes ou plaidoyer de fond, je voudrais saluer et féliciter les efforts et importantes réformes qui ont été faites par l’administration fiscale ces dernières années pour améliorer ses relations et les services avec les contribuables du secteur privé. Tout comme je me félicite du climat cordial et du dialogue public et privé constructif qui existe entre les administrations en charge de la fiscalité au Cameroun.
Globalement, quels sont les leviers que l’Etat peut activer pour attirer davantage les investissements directs étrangers ?
La dernière conférence mondiale de la CNUCED sur l’investissement qui s’est tenue à Abu Dhabi en 2024 et divers autres rapports internationaux ont relevé une évolution des investissements directs étrangers (IDE) dans le monde qui montre une tendance fluctuante (croissance modérée en 2023 et baisse en 2024) mais avec des disparités régionales fortes. L’Afrique par exemple a atteint un record en matière d’IDE en 2024 avec des flux de plus de 95 milliards de dollars (52 516 milliards de F), ce qui démontre que l’Afrique est et restera au cours des années à venir l’une des régions ou destinations les plus attractives pour les investisseurs étrangers. On observe par ailleurs que les IDE en Afrique ont été tirés par l’énergie, les infrastructures, le numérique, et l’industrie.
Le Cameroun présente de nombreux atouts et avantages comparatifs dans ces quatre domaines pouvant lui permettre d’attirer et de capter une part significative des flux d’IDE vers l’Afrique. Pour cela, l’État doit davantage travailler, à travers les structures ou administrations appropriées et en partenariat avec le secteur privé, pour bien se mettre en vitrine et bien communiquer sur ses atouts et son image à l’étranger. En outre, nous devons renforcer notre diplomatie économique en renforçant par exemple certaines de nos missions diplomatiques comme le font beaucoup de pays émergents ou certains pays africains grands bénéficiaires des IDE. En plus de cet effort interne, il faut naturellement, au plan interne, améliorer la gouvernance, notamment avec la réforme de l’administration publique. Mais plus important encore, l’État doit accélérer la réforme de la justice des affaires afin de rassurer les investisseurs étrangers potentiels de la sécurité juridique de leurs inve...
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