PME : le pari de la viabilité

On ne le souligne pas assez. Malgré les moyens colossaux dont disposent les grandes entreprises transnationales au pouvoir d’influence immense, ce sont, paradoxalement, les Petites et moyennes entreprises (PME) qui sont le moteur de l’économie mondiale. A l’échelle de la planète, celles-ci représentent plus de 95% des entreprises et génèrent plus de la moitié des emplois et du Produit intérieur brut (PIB) non agricole. Une tendance que la réalité au Cameroun ne dément pas. Ici en effet, les PME, entendues comme toute entreprise qui emploie au moins une personne et au plus 100 personnes, et dont le chiffre d’affaires hors taxes varie entre un million et un milliard de francs, constituent, elles aussi, l’essentiel du tissu économique du pays composé à 99,8% de ces unités de production de petite et de moyenne importance. Sur ces 99,8% de PME, 79,32% sont des Très petites entreprises (TPE), 19,43% des Petites entreprises (PE) et 1,25% des Moyennes entreprises (ME). 
L’actualité économique récente a remis ces PME au-devant de la scène. C’était à l’occasion de la publication (juin 2022) de l’«Annuaire statistique des PMEESA 2021 ». Une initiative louable du ministère des PME, de l’Economie sociale et de l’Artisanat qui a le don de contribuer, chiffres et analyses à l’appui, à l’amélioration de la visibilité dans ce secteur dont le rôle-clé est souvent méconnu. L’état des lieux révèle que le stock des entreprises est estimé en 2021 à 324 889 dont 324 250 PME. Suivant la répartition par secteur d’activité, ces acteurs du secteur privé se retrouvent à 84,2% dans le secteur tertiaire (commerce, transports, services) ;15,63% dans le secteur secondaire (activités de transformation, notamment l’ensemble de l'industrie) ; et seulement 0,17% dans le secteur primaire (agriculture, pêche, activités extractives).                                                                                                                               D’un point de vue structurel, le tableau n’a pas beaucoup changé depuis le deuxième Recensement général des entreprises (RGE) en 2016. En particulier, au regard de la concentration des entreprises dans les deux plus grandes villes que sont Douala et Yaoundé et une prépondérance des entreprises individuelles (97%). L’importance des PME est aussi visible dans le domaine de la création des emplois car elles recrutent plus de 7 travailleurs sur 10, soit 72,26% des effectifs permanents (RGE, 2016). Leurs contributions à la croissance et à l’occupation de la population active ne sont donc plus à démontrer. C’est dire si ces entreprises sont appelées à être la locomotive de la transformation structurelle de l’économie camerounaise que nous appelons de tous nos vœux.   
Cependant, les PME ne peuvent efficacement assumer cette fonction que si des conditions appropriées sont mises en place pour libérer leur potentiel et réduire leur taux élevé de mortalité. Dans un article intitulé : « Durée de vie et chances de survie des PME au Cameroun », Revue Economie, Gestion et Société (n°22, février 2020), Jean Pierre Evou relève que « les PME camerounaises souffrent plus encore que les autres d’un certain nombre de problèmes spécifiques aux pays africains. Les contraintes qui pèsent sur elles les exposent à une mortalité précoce et abondante ». L’enseignant-chercheur interroge ensuite les causes de la fragilité de nos PME. Sur la base d’un échantillon d’entreprises observé et suivi de 1996 à 2016, puis d’un modèle de durée, Pierre Evou apporte des esquisses de réponses à la question posée. Des résultats de l’enquête, on peut retenir, poursuit-il, que l’inexpérience et l’absence de formation dans le domaine où porte l’opportunité d’affaire précipitent la cessation d’activité des PME ; que la taille du capital initial de lancement du projet d’affaire et les types de financement déterminent la probabilité de survie ainsi que la durée de vie des PME ; que le climat des affaires dans lequel évoluent ces entreprises affecte négativement leur durée de vie.  


Pour sa part, Patrice Y. Yondeu, principal intervenant lors du séminaire sur l’amélioration de la performance globale et durable des entreprises organisé par le GICAM en novembre 2018 à Douala, estime que « le taux de mortalité des entreprises au Cameroun est de 8 sur 10 tous les 5 ans ». Ce qui signifie que sur dix entreprises créées, seules deux survivent tous les cinq ans. Autrement dit, très peu traversent la phase d’amorçage et la vallée dite de la mort. La « death valley...

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