Interview : « Il n’existe pas de méthode d’investiture plus efficace qu’une autre »
- Par Yvan BOUNOUNG
- 21 janv. 2025 12:08
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Dr Jean-Pierre Loïc Nkulu Atangana, enseignant-chercheur au département de science politique de l’Université de Bertoua.
Quelle analyse faites-vous de l’effervescence observée au sein des partis politiques concernant les déclarations de candidature à l’élection présidentielle d’octobre prochain ?
On note une reconfiguration stratégique des partis. La décision de reporter les élections législatives et municipales à 2026, initialement prévues en 2025, modifie le calendrier électoral. Ce report est perçu par certains partis d'opposition comme une manœuvre pouvant affaiblir leur dynamique avant la présidentielle. En réponse, ces partis intensifient leurs activités et multiplient les déclarations de candidature pour maintenir leur visibilité et mobiliser leurs bases électorales. On note aussi l’émergence de nouvelles figures politiques, témoignant d'une diversification de l'offre politique. Il y a également une population très jeune qui aspire à une représentation politique qui reflète mieux ses préoccupations et ses ambitions. Ce qui pousse les partis à adapter leurs discours et à proposer de nouvelles figures susceptibles de capter cet électorat.
Les mécanismes de désignation de candidats varient d’un parti politique à un autre. Y a-t-il une méthode plus efficace que l’autre ?
Il y a trois types de mécanisme de désignation des candidats : les primaires, les investitures et le consensus ou négociation interne. On dénombre deux types de primaires : les primaires ouvertes et les primaires fermées. Pour les primaires ouvertes, tous les électeurs inscrits (et parfois non membres du parti) peuvent voter pour désigner le candidat. Elles ont comme avantage d’impliquer une large base électorale, augmentant ainsi la légitimité démocratique du candidat. Elles renforcent la visibilité médiatique du parti et mobilisent les électeurs avant l’élection. Ensuite, nous avons les primaires fermées où seuls les membres du parti peuvent voter. Elles ont l’avantage de renforcer le contrôle interne sur le processus, de garantir que le candidat est en phase avec les idéaux et la vision du parti. Ensuite, les investitures (ou la désignation par le comité central ou la direction du parti) sont une sélection des candidats par une instance dirigeante restreinte. Avantages : le choix des candidats est plus rapide et moins coûteux ; il assure une cohérence stratégique et évite les divisions publiques.
Enfin, il y a le consensus ou les négociations internes. Ici, les dirigeants et les cadres du parti s’accordent sur un candidat unique sans vote formel (c’est le cas du RDPC avec l’article 27 de ses statuts). La désignation a l’avantage d’éviter les luttes internes et donne une image d’unité. Parlant de la cohésion interne, les méthodes comme la désignation par un comité ou le consensus favorisent la cohérence stratégique et limitent les divisions, mais elles peuvent nuire à la mobilisation de la base. Nous dirons donc qu’il n’existe pas de méthode universellement « plus efficace ». L’efficacité d’un mécanisme de désignation des candidats repose sur l’équilibre entre inclusion démocratique, cohérence stratégique et adaptation aux réalités politiques et organisationnelles du parti.
Comment comprendre que certaines formations politiques choisissent d’aller soutenir des candidats d’autres partis alors même qu’elles peuvent en investir un ?
Le choix de certaines formations politiques de soutenir des candidats d’autres partis, au lieu de présenter leurs propres candidats, peut être analysé sous plusieurs angles stratégiques, politiques et pragmatiques. D’une part, dans les réalités électorales, des systèmes où le paysage politique est fragmenté, il peut être difficile pour les petits partis ou les formations émergentes de remporter une élection présidentielle. En soutenant un candidat d’un parti plus influent, ils espèrent maximiser les chances de victoire d’un camp idéologique ou programmatique qui leur est proche. Par ailleurs, en soutenant un candidat, les formations politiques peuvent négocier des avantages tels que des postes ministériels, des soutiens financiers ou des garanties politiques en cas de victoire. C'est une manière d'obtenir des bénéfices sans nécessairement engager les ressources nécessaires à une candidature autonome. En outre, il y a l’alignement programmatique. Un parti peut estimer que le programme ou la vision du candidat soutenu est plus proche de ses intérêts ou idéaux que ce qu’il pourrait proposer seul et décider de prioriser cet alignement.
Il faut également relever que présenter un candidat à une élection présidentielle demande des moyens financiers, organisationnels et humains considérables. Les partis aux ressources limitées peuvent préférer investir ces ressources dans des élections locales ou législatives, jugées plus accessibles. L’on peut aussi évoquer le manque de leadership clair. Dans ce cas, certains partis politiques peuvent ne pas disposer de leaders suffisamment charismatiques ou expérimentés pour porter une candidature nationale crédible. D’où la dynamique de positionnement à long terme et le renforcement de l’unité de l&...
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