« L’espace virtuel est une niche électorale à convaincre »

 Comme en 2018, le président de la République a annoncé sa décision d’être candidat à l’élection présidentielle en privilégiant la voie du digital, notamment les réseaux sociaux. Du point de vue de la communication numérique, comment interprétez-vous ce choix ?
Comme Donald Trump aux États-Unis et la plupart des chefs d’État modernes, Paul Biya est en phase avec le mode communicationnel actuel marqué par une percée fulgurante des réseaux sociaux qui tendent à focaliser davantage l’attention de l’opinion publique par rapport aux médias traditionnels. En effet, ces derniers sont limités par des horaires de diffusion et des formats de publication préconçus. Bien plus, du point de vue de l’ancrage stratégique, ce politicien aguerri est conscient de la puissance et de la célérité avec lesquelles circulent les contenus numériques, et donc de leur capacité à toucher des cibles inespérées. C’est pourquoi il entend, comme par le passé, capitaliser les atouts du digital afin de toucher de potentiels électeurs, notamment les jeunes de plus en plus connectés et qui représentent, selon la Banque mondiale, 57 % de la population camerounaise.

Plusieurs autres personnalités politiques qui veulent également briguer la magistrature suprême se servent d’Internet pour leur communication. Quelle appréciation pouvez-vous faire des méthodes employées par les uns et les autres ?
À l’observation, il y a beaucoup d’impréparation. En ce moment, l’on peut distinguer deux catégories d’entrepreneurs politiques sur la toile. D’un côté, celle qui espère être visible et gagner l’élection à travers une présence banale en ligne, sans insister sur un projet de société convaincant ou sur un accompagnement en amont par des experts sur les modalités et les stratégies de communication numérique qui consistent à s’approprier les fonctionnalités des différentes plateformes. Mais aussi, à publier des contenus pertinents suivant un certain nombre de principes édictés par les algorithmes de ces plateformes, c’est-à-dire à mettre l’accent sur l’interactivité avec les internautes, la cohérence des publications et la veille concurrentielle.   De l’autre, une catégorie plus avisée qui s’offre les services d’une équipe de communication solide et multitâche, qui sait anticiper et adapter des contenus en fonction des cibles sur la base d’une offre politique savamment mûrie, puisqu’en présentiel, il n’y a pas d’improvisation sur la toile.

Dans notre contexte, quelle est la plus-value des outils du numérique dans la communication politique en période électorale ?
Ici, comme ailleurs, au-delà de la communication instantanée, les réseaux sociaux numériques constituent une aubaine pour l...