« Il reste maintenant à vaincre les barrières socioculturelles… »

Le ministre de la Promotion de la Femme et de la Famille, Marie-Thérèse Abena Ondoa.

Madame le Ministre, en 1995 la conférence de Beijing marquait des avancées importantes par les engagements de 189 gouvernements présents pour l’affirmation des droits des femmes et leur autonomisation. 30 ans après, où en sommes-nous au Cameroun ?    
Merci pour l’opportunité que vous me donnez de m’exprimer sur ce sujet d’actualité au regard du thème de la 40ème édition de la Journée internationale de la femme. Je tiens tout d’abord à signaler que le Cameroun a pris part activement à cette rencontre aux côtés de 188 autres Etats. 30 ans après leur adoption, les 12 domaines critiques identifiés comme des couloirs d’obstacles à l’épanouissement des femmes et filles restent d’actualité au Cameroun. Qu’il s’agisse de la pauvreté, de l’éducation et de la formation, de la violence à l’égard des femmes, des conflits armés, de l’économie, du pouvoir et la prise de décision, des mécanismes institutionnels de promotion des femmes, des droits fondamentaux des femmes, des médias, de l’environnement et de la petite fille. C’est la raison pour laquelle la culture de l’égalité des sexes figure parmi les priorités du Gouvernement camerounais dans sa quête du développement durable. Cette volonté politique est clairement affirmée par le chef de l’Etat, Son Excellence Paul Biya depuis son accession à la Magistrature suprême et transparaît dans la vision de développement du Cameroun à l’horizon 2035. Le chef de l’Etat a fait de la promotion de la femme l’un de ses chevaux de bataille à travers la création d’un ministère dédié, la ratification de la quasi-totalité des instruments juridiques de promotion et de protection des droits de la femme, et la mise en œuvre de projets spécifiques et inclusifs permettant d’encadrer les femmes dans tous les secteurs sur l’étendue du territoire national. 


En termes d’accès à l’éducation, la santé, la liberté de choix, le statut des filles et des femmes a-t-il véritablement évolué ? 
La situation de l’éducation peut être jugée améliorée dans l’ensemble au Cameroun. Le taux d’alphabétisation des personnes de 15-64 ans est de 77,7% et celui des    15-24 ans de 86%, traduisant ainsi des améliorations intergénérationnelles. S’agissant de l’enseignement primaire, le taux de parité fille/garçon est 0,99%. Dans l’enseignement secondaire, il est de 0,98%. Au niveau de l’enseignement supérieur, on note d’une part une progression de filles lauréates au diplôme de fin de second cycle dans les systèmes au Cameroun et, d’autre part, une évolution des effectifs de filles réduisant ainsi l’écart entre les sexes dans les universités. (Source profil genre Pays 2021). L’une des préoccupations majeures du Gouvernement a toujours été de mettre en place un système de santé hautement performant qui promeut le bien-être de la population dans un esprit d’équité. Ainsi, l’opérationnalisation, en 2023 de la couverture santé universelle a marqué une étape importante. Des mesures ont également été prises pour la promotion de la santé maternelle et infantile de manière spécifiques, à travers un meilleur accès aux soins prénataux et aux campagnes de vaccination. Toutefois, la mortalité maternelle demeure un véritable défi. La participation des femmes à la vie politique et économique est visible, même si elles restent sous-représentées dans les instances décisionnelles. 


En dehors des domaines sus-évoqués, quels changements essentiels retenez-vous pour la femme camerounaise depuis 1995 ?
Le gouvernement, à travers ses cadres juridique, stratégique et institutionnel en matière de genre, œuvre de manière permanent pour l’amélioration des conditions de vie des femmes. A titre illustratif, la loi N°2016/007 du 12 juillet 2016 portant code pénal incrimine le viol, le harcèlement sexuel ; les circulaires présidentielles relatives à la préparation du budget de l’Etat exigent la prise en compte du genre pour adresser les besoins spécifiques des femmes dans tous les secteurs, avec à la clé un document sur la budgétisation sensible au genre annexé à la loi de finances depuis 2022, etc. Le Cameroun a ratifié la majorité des conventions et traités internationaux de promotion des droits de l’homme et plus spécifiquement des droits des femmes, et intègre progressivement leurs principes dans sa législation nationale. Le chef de l’Etat, Son Excellence Paul Biya, a mis en place un environnement socio-culturel favorable à la promotion et de protection des droits de la femme afin de mieux la positionner dans les sphères de prise de décision. L’élargissement des opportunités économiques des femmes, la lutte contre les violences basées sur le genre, la reconnaissance accrue du rôle des femmes dans la paix et la sécurité, la révision des lois pour la succession et la propriété foncière ne sont pas en reste.


Une des 12 priorités des résolutions du programme d’action de la Conférence de Beijing était : les femmes au pouvoir et dans la prise de décision. Y a-t-il vraiment des avancées significatives tant quantitativement que qualitativement dans ce sens ? 
Des avancées significatives ont été enregistrées. En ce qui concerne la participation politique des femmes dans les sphères de prise de décision, l’on note des progrès traduits en chiffres à la faveur de la Constitution de 1996 qui consacre l’égalité des hommes et des femmes, et du Code électoral du 19 avril 2012 qui a inscrit la prise en compte du genre dans la constitution des listes de candidats aux élections et en a fait une condition de recevabilité desdites listes. Ces législations ont permis au pays d’enregistrer une nette amélioration du positionnement des femmes dans les postes électifs. 24% des postes de conseillers municipaux, 10,83% des exécutifs municipaux, 33% des sièges à l’Assemblée nationale, 33% de sièges au Sénat sont occupés par des femmes. Pour ce qui est de l’accès des femmes aux postes nominatifs de décision, le palmarès genre des administrations publiques et parapubliques le situe à moins de 30 %. Sur le plan qualitatif, on peut relever la progression des femmes dans le commandement territorial. Depuis 2020, le Cameroun compte 30 sous–préfets femmes sur 360 (soit 8,33%), 56 adjointes au sous-préfet sur 360 soit 21,21% et 22 adjointes au préfet sur 138 soit 15,94%, 01 femme préfet sur 58 soit 1,72%. Il faut consolider ces acquis et continuer à œuvrer en faveur de l’amélioration de la situation de la femme dans tous les secteurs. C'est la raison pour laquelle le gouvernement continue de renforcer les mécanismes de promotion du leadership féminin à travers des formations, des quotas et des mesures incitatives, et l’implication de toutes les parties prenantes.


La révision du Code de la famille a pendant quelques années retenu l’attention de l’opinion publique, car représentant un véritable tournant dans la vie des femmes. On n’en parle plus : qu’est-il devenu ?
La révision du Code des personnes et de la famille au Cameroun est un sujet qui suscite de l'intérêt au regard de la diversité socio culturelle du Cameroun et des problèmes sociaux émergents. La contribution du ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille dans l’élaboration de cet important outil a été transmise au ministère de la Justice. En mars 2022, l'Association camerounaise des femmes juristes (ACAFEJ) a organisé un ate...

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